L’heure est au combat culturel

Entretien avec Ahmed El Attar, metteur en scène et auteur dramatique indépendant égyptien

Ahmed EL ATTAR


Ahmed El Attar est metteur en scène et auteur dramatique indépendant. Il est également le directeur et le fondateur de Studio Emad ed-Din, situé au centre-ville du Caire. Il s’agit d’un lieu de formation et de répétition pour les arts de la scène en priorité, mais également pour les arts visuels. « C’est un lieu unique en son genre en Egypte, qui permet à des artistes de travailler sur leurs projets en toute liberté. », dit-il. Et il ajoute : « Nous y organisons également entre 12 et 20 formations différentes par an dans le domaine des arts de la scène (danse contemporaine, éclairage théâtral, dramaturgie, etc.) Ces formations sont données par des artistes, des professionnels d’Egypte et d’Europe. Nous aidons également les jeunes artistes à se développer artistiquement, en organisant tous les ans un festival de jeunes créateurs et en produisant 4 à 6 spectacles par an, théâtre ou danse contemporaine. Nous les aidons également à partir en résidence dans d’autres pays, dans des structures professionnelles, etc. »

 

Dans un café, place de la Bastille, à Paris, retrouvailles joyeuses d’après-révolution.

 

Transeuropéennes : Cette révolution égyptienne, la sentais-tu se préparer ?

Ahmed El Attar : La révolution, personne ne l’a vue venir ! Et c’est normal, dans le sens que cela fait des années que nous vivons dans un pessimisme chronique, nous qui travaillons dans le domaine artistique indépendant, en marge des grandes industries. Nous ne parvenions plus à voir plus le fruit de nos œuvres. Entre la marginalisation de ce que nous faisions et la détérioration de la situation globale de la société, il y avait une fatalité, une dépression chronique qui nous a tous empêchés de voir ce moment venir. Cependant, malgré cette situation, nous avions gardé un peu d’espoir, la preuve en est que, le moment venu, tout le monde est descendu dans la rue.

J’étais à Paris le 25 janvier, je devais rentrer au Caire le 26 dans l’après-midi. Le 25, j’ai vu un copain, un grand artiste visuel dénommé Hassan Khân, qui était plein d’espoir. Nous avons parlé des manifestations en Egypte et je lui ai dit que, depuis plusieurs années, les manifestations, en Egypte ne rassemblaient guère plus que quelques centaines de personnes, et que je ne pensais donc pas que les événements semblables à ceux de la Tunisie se produiraient en Egypte avant dix ans. Je suis rentré le 26 au soir, je suis allé le 27 au studio pour travailler, normalement. Le soir même, l’accès à internet a été coupé. Le 28 au matin, les réseaux des téléphones portables ont été coupés. Je suis passé chez un copain, qui avait chez lui une dizaine d’amis, et nous sommes descendus. Je suis rentré vers 22h, et j’ai continué à descendre tous les jours, jusqu’à ce que Moubarak soit parti. Je continue à descendre encore, lorsque je suis au Caire, le vendredi, quand il y a quelque chose à défendre.

 

TE : Quel regard portes-tu, en tant qu’homme de théâtre, sur cet espace du commun qui s’est ainsi créé ?

Ahmed El Attar : La surprise – quand j’en parle, j’en ai encore la chair de poule –, c’est que tout le monde a été mobilisé, vraiment tout le monde : les hommes, les femmes, les musulmans, les chrétiens, les riches, les pauvres, tout le monde était là. J’ai vu toute la société égyptienne descendre le 28 février. Tout à coup s’est révélée la vraie nature de la société égyptienne, qui avait été, par le fait d’une machination systématique, enterrée – au fil du temps, par le régime en place,  qui était lui-même le fruit du régime institué par Nasser en 1952 et poursuivi avec Sadate. C’est l’héritage de plus de cinquante ans de règne militaire et oppressif. Nous disions de nous-mêmes que nous étions nuls, que nous avions une société pourrie, nous nous sommes rendus compte que ce discours et cette matière de voir l’Egypte étaient voulues. Le régime en place nous a poussés à nous haïr nous-mêmes, en nous faisant croire que la société égyptienne était destinée à être ce qu’elle était. Nous avons découvert, le 28, le 29, le 30 janvier et le 1er février que ce n’était pas du tout ça, que les jeunes issus des classes défavorisées, venant de la campagne, étaient tout à fait conscients de ce qui se passait dans le pays, et que les vieux l’étaient aussi… Cette prise de conscience était une surprise, mais aussi une joie. Le régime voulait que nous pensions ainsi pour qu’il n’y ait plus d’espoir de changement, mais c’est le contraire qui s’est produit. De manière plus personnelle, en parlant aux gens, en voyant leurs slogans, j’ai perçu la dimension collective de l’événement : les femmes n’ont pas été harcelées, les chrétiens et les musulmans se protégeaient à tour de rôle au moment de la prière … tous les maux de la société égyptienne ont disparu pendant les manifestations, tous étaient solidaires. Après le départ de Moubarak, la place a été nettoyée, elle est devenue la place la plus propre du Caire.

 

TE : Qu’entends-tu par « la nature mythologique de la société égyptienne » exactement ? Et qu’en est-il de cette « capacité générale d’imagination » que tu as évoquée au début de notre entretien, avant l’enregistrement ?

Ahmed El Attar : La vraie nature mythologique de la société égyptienne, c’est cette conscience qu’ont les Egyptiens de l’Egypte comme la mère du monde, la plus ancienne civilisation. Ce discours ultranationaliste a été récupéré par le pouvoir, mais il n’était pas en phase avec ce qui se passait. Et, d’un autre côté, le peuple égyptien est un peuple sédentaire, très attaché à sa terre et, quand il a le choix, il n’émigre pas. L’Egypte a accueilli presque toutes les civilisations du monde et s’est intégrée dans ces civilisations. C’est un peuple qui a un sens civique et un amour pour le pays. Il y a également une générosité, un pacifisme. Tout cela est mythologique mais, en même temps, cela a pris vie. Le 28 par exemple, lors des grandes confrontations avec les forces de l’ordre entre midi et 21h, j’ai vu que la violence était focalisée sur les forces de l’ordre. Au fur et à mesure que les gens avançaient, les forces de l’ordre reculaient, les foules poussaient les policiers vers la place Tahrir. Il y avait des clubs, des musées (le musée Mahmoud Mokhtar), les jardins, etc. et les gens n’ont rien cassé.  Ils cassaient les trottoirs pour prendre des pierres et les jeter sur les forces de l’ordre, mais personne n’a pensé entrer dans l’opéra ou au casino pour tout détruire. Ni les biens publics ni les biens privés n’ont été saccagés. Les voitures non plus. Tout ce qui a été brûlé et cassé ce jour-là, ce sont les voitures des flics et les locaux du parti au pouvoir – destructions dont on a d’ailleurs dit qu’elles avaient été voulues par le régime, pour détruire des documents qui se trouvaient à l’intérieur. J’ai vu des manifestations en Europe où tout était détruit, cassé, mais tel n’était pas le cas ici.

Faire la différence entre le combat réel pour le changement politique et la violence gratuite, c’est cela, pour moi, le  mythologique.

 

TE : Ce mythologique était-il d’essence collective ou était-il guidé par des chefs?

Ahmed El Attar : Il n’y avait pas de chefs. Les gens chantaient des slogans qui n’étaient pas connectés entre eux, chacun pouvait dire ce qu’il voulait dire, les gens répétaient derrière. Quand quelqu’un clamait des paroles sortant des normes, les autres, autour, refusaient de suivre. Il y avait une réelle conscience collective. Et pour moi c’est cela qui est mythologique. Cette conscience qui s’est reformée, qui a duré et qui n’a pas déraillé. C’est un sens civique aussi. Ces événements ont rendu aux gens leur pays.

 

TE : L’espace public était entièrement confisqué et monopolisé…

Ahmed El Attar : Oui,  et quand on leur a rendu leur espace public, ils se sont comportés comme il le fallait !

 

TE : La reconquête de cette capacité imaginative confisquée s’est-elle traduite dans les manières d’investir l’espace public ?

Ahmed El Attar : Quand je parle de capacité imaginative, d’imagination, je parle de la capacité à imaginer demain d’une autre façon qu’aujourd’hui. C’est cela qui m’a impressionné.  Il s’agissait d’un rêve collectif concernant les aspirations de tous pour leur avenir et pour celui de leurs enfants. Ces aspirations n’étaient pas d’abord matérialiste, elles étaient beaucoup plus profondes, portant sur l’éducation, le droit au logement, l’émancipation, la liberté, les valeurs humaines universelles. Et ce n’était pas le discours des intellectuels et des artistes, mais celui des gens de la rue, des classes défavorisées.

 

TE : Penses-tu que les intellectuels, les artistes seraient allés jusqu’au bout s’il n’y avait pas eu la détermination du peuple ? Auraient-ils été plus disposés à négocier avec le régime ?

Ahmed El Attar : Il est difficile de parler en général des artistes en général, parce qu’il existe une grande variété parmi eux : artistes indépendants, issus des industries culturelles, etc. Il est intéressant de relever que, même les artistes ayant des carrières dans les industries sont descendus dans la rue, qu’ils ont risqué leurs carrières, et il ne s’agissait pas là seulement des jeunes. Ils risquaient beaucoup, ils étaient là en train de crier « A bas le régime ! » Le régime a essayé de tromper tout le monde, et je ne peux pas dire que je n’étais pas moi-même trompé. Le premier discours de Moubarak, où il annonçait qu’il ne se présenterait plus et qu’il allait changer le gouvernement, a touché les gens. Mais, le lendemain, le jour de l’assaut contre les manifestants, la bataille qui a eu lieu a complètement changé la donne. Ceux qui avaient commencé à douter sont devenus déterminés, disant : « il faut qu’il parte ». Pour moi c’était clair, mais pas pour d’autres.

 

TE : Qu’en était-il de la théâtralité des manifestations ?

Ahmed El Attar: C’étaient les manifestations les plus drôles du monde. Les Egyptiens ont beaucoup d’humour. Les pancartes brandies étaient tellement drôles que je m’arrêtais souvent, je rigolais, et j’embrassais son porteur ! Dans les slogans sur les pancartess, on lisait par exemple : « Allez casse-toi j’ai mal au bras ! », « On te l’a dit en arabe, tu n’as pas compris –» (et c’était suivi de caractères chinois), « Donne-moi un milliard et tu restes !». La société s’exprimait par le biais de la dérision. C’étaient des moments inoubliables, avec une intensité d’émotion qu’on ne vit pas tous les jours. Tu te réveilles et tu es plein d’espoir, tu passes d’un état émotionnel à l’autre très vite.

 

TE : Penses-tu qu’il s’agit d’un moment fondateur, pour les jeunes générations ? Est-ce que plus rien ne sera comme avant ?

Ahmed El Attar : J’espère que tel sera le cas, mais il y a beaucoup à faire. Nous avons changé le système. Maintenant il faut changer la culture, c’est la partie la plus difficile. Nous avons une culture de la corruption, une culture de l’apathie, une culture de la peur, marquée par le manque de liberté d’expression, et cela doit changer. C’est ce qui prendra le plus de temps.

Ce que je recherche, dans une démocratie, c’est une discussion ouverte entre tous, fonctionnaires de l’Etat ou pas. C’est de cette culture que je parle. Le lendemain du jour où le premier ministre est parti, les gens ont découvert que le service sécuritaire interne, l’équivalent de la STASI, commençait à brûler ses archives. Lorsque les gens ont découvert cela, à Alexandrie, ils ont encerclé le bâtiment et,  pendant 48h, partout en Egypte, les gens ont occupé ces centres. Ils y ont découvert aussi des détenus qui se trouvaient dans des souterrains, parfois depuis six mois, et qui ne savaient même pas qu’il y avait une révolution.

 

TE : Dans ce changement culturel, le travail de mémoire et de justice est-il important à tes yeux? Penses-tu qu’il faille aller dépouiller les archives ?

Ahmed El Attar : Oui il faut le faire, doucement, mais il faut le faire. Justice doit être rendue. Il faut faire toute la lumière sur les atrocités qui ont été commises et de mettre en prison les coupables, mais aussi avoir la possibilité de pardonner. Mais nous ne pouvons cependant pas pardonner sans savoir.

 

TE : Comment situer « aujourd’hui » ton propre travail artistique, et plus largement la responsabilité des artistes?

Ahmed El Attar : C’est une question qui m’a hantée après la révolution, dans le sens où tout ce j’ai fait jusqu’à aujourd’hui était contre le régime, sans je sois pour autant un héros ni un militant politique. Pour moi, il s’agissait de comprendre la machination, la machine infernale de l’oppression sur différents niveaux : la famille, le pouvoir, ou les deux, et de le présenter de façon subtile, à ma façon, au public. Ce n’était pas seulement la valeur artistique qui était en jeu, mais également le fait même de se produire, de montrer que l’on pouvait s’exprimer de cette façon, donner à d’autres l’envie de s’exprimer, dans d’autres domaines, et telle est  la valeur de l’art.

Après la révolution, je me suis tout d’abord demandé quoi faire à présent. Mais j’ai dépassé ce moment. Le combat continue. Il y a une contre-révolution, les gens ne font pas le rapport entre ce qui s’est passé place Tahrir et la vie quotidienne. Il y a une dichotomie dans les esprits, et cela me pousse à poursuivre et à aller plus loin. Il faut utiliser ce moment pour instaurer une vraie réflexion et ouvrir davantage les portes de la liberté, pour continuer à disséquer la société et la culture.

 

TE : En somme, il faudra traduire ce qui s’est passé place Tahrir dans tous les aspects de la vie sociale…

Ahmed El Attar : Oui. Encore une fois, les questions fondamentales, culturelles, politiques et sociales sont toujours là. La semaine dernière, il y a eu une confrontation entre chrétiens et musulmans dans un village, probablement provoquée par ce qui reste de l’ancien service de sécurité. Cela montre que nous ne sommes pas complètement guéris. La révolution n’est pas terminée. Il y aura probablement dans mon travail un changement artistique, dont je n’en suis pas encore conscient, mais qui se révélera dans le processus de travail, comme toujours pour moi. Il faut que je continue. Je dois détruire l’image du père tout-puissant et c’est aujourd’hui encore plus important de le faire qu’avant, parce que c’est le moment où tout le monde y est sensible. Avant, cela revêtait un caractère plus théorique : critiquer le père, le démanteler comme figure de pouvoir ne faisait pas grand sens. Aujourd’hui cela fait beaucoup plus sens.  

 

TE : Il y a le père et il y a aussi l’ombre du père. N’est-ce pas de l’ombre du père qu’il est plus difficile de se débarrasser ?

Ahmed El Attar : L’enjeu est de ne pas recréer d’autres pères, si l’on ne veut pas se retrouver dans dix ans avec quelqu’un d’autre qui recommencera. Cela commence à la maison, dès le tout début. Vient le moment où il faut dire non, comme les jeunes l’ont fait en allant dans la rue, mais ils n’y sont pas allés contre leurs parents, lesquels étaient totalement soumis.

 

TE : Est-ce la jeune génération qui a émancipé les parents ?

Ahmed El Attar : Oui, et il ne faut pas le perdre de vue, c’est fondamental pour la culture à construire. Cela prouve qu’on ne peut pas construire autour de la figure centrale toute-puissante.

 

TE : Dans une pièce de Jalila Baccar et de Fadhel Jaïbi, qui s’appelle Jounoun, c’est la mère qui porte la folie de la société tunisienne malade de son chef. Et je voulais te demander comment tu voyais ce rôle de la mère et la manière de repenser le rôle des femmes – pas seulement en terme de droits mais dans cette relation à l’autorité qui va se transformer ?

Ahmed El Attar : Les femmes sont descendues. J’ai vu des jeunes filles de 20 ans, voilées, descendre et aller en chantant, au devant, avec courage et détermination. La révolution a redonné à la femme sa place dans la société. Il faut continuer à travailler là-dessus, parce ce n’est pas gagné. La mère a plutôt un rôle passif, surtout dans la société égyptienne, elle est complètement soumise et n’intervient jamais, sauf pour soutenir cette configuration du père tout-puissant qui n’a jamais tort, qu’on ne questionne jamais … Bien sûr, ce que je raconte est quelque peu caricatural, parce que je parle aussi de mon histoire qui, d’une certaine façon, ressemble à beaucoup d’autres histoires, avec des nuances différentes, et qui représente aussi la façon dont la société se comporte envers le pouvoir. La mère et la femme se sont présentées comme moteur de changement dans cette révolution et je pense qu’il faut continuer à montrer cela.

 

TE : Tu parlais de la nécessité de réduire cette dichotomie entre ce qui s’est passé sur la place, au moment des événements, et la conscience que les gens en ont maintenant, dans la vie quotidienne, une traduction dans la vie quotidienne de tout cela. Mais est-ce qu’il fallait effacer les traces de la révolution si vite ?

Ahmed El Attar : Ce sont les jeunes eux-mêmes qui ont effacé les graffitis et les traces de la révolution. Pour eux, c’était une nouvelle ère qui commençait. Ils voulaient d’une Egypte plus belle, plus propre, alors ils ont nettoyé, peint les trottoirs, enlevé les poubelles.

 

TE : Cette question, c’est au fond de savoir si l’on a besoin de traces, d’images pour avancer ou si l’événement est tellement fort qu’on peut se permettre d’en effacer les traces manifestes… Venons-en, si tu le veux bien, à la situation en termes de relations internationales et de coopération. On sent, en Tunisie par exemple, que la présence internationale n’est pas souhaitée, et que la conduite à bonne fin du processus doit être menée par les Tunisiens eux-mêmes, ce qui est plutôt bon signe. Qu’en est-il en Egypte ? Et, surtout, du point de vue artistique et culturel, qu’attendrais-tu de la « communauté internationale » ?

Ahmed El Attar : En ce qui concerne l’avenir, et dans mon domaine en particulier, depuis des années, nos financeurs nous posent la question « A quoi sert de financer la culture ? Comment quantifier les résultats de vos institutions ? » Cela fait des années que nous leur expliquons que le développement artistique et culturel est aussi important – sinon plus – que le développement dans son sens classique – économique et social – parce qu’il constitue un véritable moteur de changement. Une des raisons de la dépression chronique où nous étions tient aussi ce questionnement stupide et permanent que nous subissons depuis des années. La révolution a prouvé que ce que nous disions était sensé, parce qu’elle a été une révolution culturelle : ce sont les jeunes, qui connaissent les réseaux sociaux, qui ont un désir d’expression et qui s’intéressent au monde qui ont fait cette révolution. Ils ont cassé le mur de silence, les barrières culturelles et tout le monde les a suivi. Les acteurs culturels  ont  été le fer de lance de la révolution. Ils ont ouvert des espaces de liberté qui les ont aussi conduits à s’exprimer dans la rue, sans agenda politique. Pour moi, il est évident que la coopération internationale doit se poursuivre mais que les questions qui nous sont adressées doivent changer. Il est actuellement bien difficile en Europe de comprendre comment la culture peut changer une société, mais dans nos sociétés, où tout est à changer, cela est extrêmement clair.

 

TE : Peut-être les Européens ont-ils du mal à comprendre cela, parce qu’ils sont eux-mêmes soumis à un puissant discours de dévalorisation de la culture et des acteurs culturels…

Ahmed El Attar : Tout à fait, et le combat à venir sera un combat culturel : les acquis de cette révolution ne seront développés qu’avec la culture, les arts et le travail artistique. Comment continuer à donner la voix à ceux qui l’ont prise ? C’est la seule garantie que les acquis de ce magnifique acte soient intégrés dans la société.

 

 

Propos recueillis par Ghislaine Glasson Deschaumes