Récits d'une Syrie oubliée.

Sortir la mémoire des prisons


Le livre de Yassin Al Haj Saleh Récits d'une Syrie oubliée. Sortir la mémoire des prisons vient de paraître dans la collection Traversées, dirigée par Franck Mermier et Timour Muhidine, éditée aux Editions les Prairies ordinaires en coédition avec Transeuropéennes, avec le soutien du CNL et la FEMDH. Il est traduit de l'arabe (Syrie) par Marianne Babut et Nathalie Bontemps. Il est disponible en librairie.

Le récit fait par Yassin Al Haj Saleh de ses seize années de prison en Syrie est plus qu’un témoignage sur l’univers carcéral : il se double d’une analyse approfondie des transformations que la détention a opérées en lui ainsi que d’une réflexion forte sur la culture politique syrienne façonnée par plusieurs décennies de dictature et les difficultés du dialogue entre prisonniers de différentes obédiences politiques. La prison a transformé ce militant de gauche et médecin de formation en écrivain et en observateur lucide de la société syrienne, dont les analyses paraissent régulièrement dans la presse arabe et internationale.
L’auteur questionne les notions de liberté et d’aliénation à partir de son expérience carcérale. Il prolonge cette réflexion dans une introduction et une postface où il relate son parcours d’activiste clandestin depuis le début de la révolte syrienne en mars 2011 puis son expérience de l’exil. Il y analyse aussi les formes de l’oubli et de la mémoire sous une dictature qui a envahi de ses symboles et de ses discours tous les recoins de la sphère publique. L’oeuvre de Yassin Al Haj Saleh reste largement méconnue en Occident – seuls quelques articles ont été traduits dans la presse francophone et anglophone –, alors qu’il est une figure incontournable de la scène culturelle et politique syrienne et arabe. Si la littérature arabe retient l’attention de quelques éditeurs français, il est rare que des textes arabes de non-fiction soient portés à la connaissance du public. Outre la haute qualité littéraire de ses textes, c’est aussi l’originalité et la pertinence de ses analyses qui sont à souligner. Il apparaît urgent de livrer au public francophone une vision de l’intérieur particulièrement informée et de porter à sa connaissance tout un pan d’une production intellectuelle qui, en exil ou en Syrie même, s’épanouit dans l’urgence de documenter la société syrienne et de lui redonner ses capacités d’expression après un long et cruel silence.


Né à Raqqa en 1961, Yassin Al Haj Saleh est, à l’âge de 19 ans, jeté en prison pour appartenance à l’aile démocratique du Parti communiste syrien que dirige alors l’opposant Riyad Turk. Il y restera durant 16 ans, de 1980 à 1996. Il entre en clandestinité dès les premiers jours du soulèvement syrien, dont il est considéré comme l’un des principaux théoriciens. Il joue un rôle essentiel dans la mise en place des Comités Locaux de Coordination et, par ses articles publiés dans divers journaux et périodiques, contribue à la réflexion sur le déroulement et la finalité de la révolution. Il réside désormais en Turquie, où il poursuit son travail de réflexion et d’analyse de la vie politique syrienne. Comptant parmi les auteurs et dissidents arabes les plus influents, éminent porte-parole de la révolution syrienne, il écrit sur tous les sujets, politiques, sociaux et culturels, relatifs à la Syrie et au monde arabe, pour de nombreux journaux arabes.